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En France, une personne sur quatre a été, est ou sera concernée au cours de sa vie par des troubles psychiques. En France toujours, un jeune sur deux déclare présenter des difficultés d’ordre psychologique et un jeune sur trois a déjà eu des idées suicidaires. C’est aussi à ces âges que peuvent se manifester les premiers signes de certaines pathologies psychiatriques lourdes.
Outre l’errance diagnostique et thérapeutique et l’ignorance dans laquelle se trouve l’entourage pour détecter les premiers symptômes, stigmatisation et déni freinent l’accès aux soins. Trop souvent, le premier contact avec la psychiatrie passe par les urgences et l’hospitalisation complète, parfois sans consentement.
Un traitement est généralement plus efficace quand il est accepté de plein gré. Toutefois, la contrainte aux soins se justifie juridiquement lorsque les troubles mentaux altèrent la conscience du besoin de soins et qu’il y a un risque d’atteinte à la sûreté des personnes ou un danger imminent pour la personne elle-même (tentatives de suicide, automutilations…).
Dans les maladies psychiques, le déni est souvent l’une des premières réactions de la personne malade et de son entourage. Reconnaître que l’on a un problème est tout sauf évident.
Les principaux troubles cognitifs liés aux maladies psychiques sont :
La difficulté à se reconnaître malade mais aussi la peur d’affronter le diagnostic retarde la prise en charge médicale, surtout lorsque la personne se persuade que sa maladie est incurable et que nul ne pourra l’aider à aller mieux.
La complexité du système de santé rebute et décourage. L’offre existante ne correspond que partiellement aux besoins des malades. Le manque de structures spécifiques de prévention, de détection et prise en charge des troubles psychiatriques des adolescents et des jeunes adultes est patent. Et alors que l’hétérogénéité clinique des maladies et la multiplicité des traitements plaident pour des soins très spécifiques, cette psychiatrie spécialisée tarde à émerger en France.
Qui voir ? Un psychiatre, un psychologue, un psychothérapeute, un psychanalyste… ?
Quand on a mal aux dents, on consulte un dentiste. Quand on a des troubles de la vue, on se tourne vers un ophtalmologiste. Mais vers quel spécialiste se tourner quand la colère ou l’angoisse nous submerge, que ça passe et ça revient, et qu’on est seul face à un labyrinthe organisationnel dans lequel même les acteurs les plus informés se perdent.
Les acteurs intégrés aux parcours de soins sont très nombreux : réseau local médical, social, judiciaire, enseignants de l’Éducation nationale, etc. Ces acteurs communiquent-ils efficacement entre eux ? Sont-ils bien formés au repérage précoce des troubles mentaux ? Ont-ils les moyens de favoriser un accès rapide aux soins spécialisés ? Dans la vaste majorité des cas, la réponse à ces questions laisse à désirer.
Autre spécificité française : le lieu d’habitation de la personne malade détermine le secteur dont elle dépend. Autant dire que cela ne facilite guère l’accès aux soins des sans-abris. Certes, depuis la loi du 5 juillet 2011, « toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques (..) dispose du droit de s’adresser au praticien ou à l’équipe de santé mentale, publique ou privée, de son choix (…)»[2]. Mais dans les faits, ce libre choix n’est pas toujours facile à obtenir.
Dans le secteur privé, le choix de la clinique et du praticien est totalement libre. Les locaux sont souvent de meilleure qualité et les psychiatres plus disponibles. En revanche, les coûts sont généralement très supérieurs et le suivi en CMP à la sortie de l’hospitalisation, difficile à obtenir.
Dans l’imaginaire collectif, la maladie mentale est encore trop souvent associée à la folie. Le « fou » n’a pas conscience de sa folie. Il ne souffre pas et ses actes sont inexplicables[3]. Cette représentation tenace du « fou » semble être encore aujourd’hui à l’origine de bien des préjugés. Entretenue par des œuvres cinématographiques riches en personnages effrayants, la stigmatisation et la discrimination subies par les malades, leurs proches et les professionnels de la psychiatrie freinent l’accès aux soins.
Les acteurs médiatiques ont une lourde responsabilité dans la perpétuation des idées reçues sur les maladies mentales. Une étude de 2015 a montré que le film Vol au-dessus d’un nid de coucou avait contribué à renforcer les sentiments de peur et de rejet à l’égard des malades mentaux. En juin 2017, dans le jeu télévisé Fort Boyard, une épreuve intitulée « l’asile », a suscité de très vives réactions. Le défenseur des droits a été saisi et dans sa lettre ouverte à la présidente de France Télévisions, l’Unafam a déploré les stéréotypes caricaturaux mis en scène à une heure de grande écoute : « Comment convaincre un jeune de consulter avec une telle image de la psychiatrie ? »
L’Unafam milite pour la construction d’une triple alliance thérapeutique dont les trois prérequis sont la reconnaissance du besoin d’un soutien émotionnel pour la famille, l’accès à la psychoéducation et le contact régulier avec l’équipe médicale selon une fréquence adaptée.
L’hôpital Saint-Anne à Paris propose des consultations dédiées aux familles. Le centre hospitalier Charles Perrens à Bordeaux le fait également. Quand un proche va très mal, un psychiatre peut recevoir en urgence la famille et faire le point sur les options possibles. La famille peut apporter des éclairages pour aider à évaluer plus précisément certains aspects de la maladie.
Toutes ces initiatives méritent d’être saluées, encouragées et développées au même titre que la psychoéducation, la pair aidance et les groupes d’entraide mutuelle. Une formation généralisée de tous les soignants à l’entretien motivationnel pourrait également contribuer à augmenter le nombre d’alliances thérapeutiques fructueuses.
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Sources : Psychiatrie : l’état d’urgence, Marion Leboyer, Pierre-Michel Llorca Ed. Pluriel,
afdem.org.
[1] Source : Unafam
[2] Code de la santé publique article L3211-1, modifié par la LOI n°2011-803 du 5 juillet 2011 – art. 1
[3] Représentation extraite d’une recherche-action conduite auprès de 38 000 personnes entre 1998 et 2003 par l’ASEP, le CCOMS et la DREES.